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jeudi 27 août 2015

COUP DE CHAUD de RAPHAEL JACOULOT par Critique Chonchon

"Coup de chaud".

Au cœur d’un été caniculaire, dans un petit village à la tranquillité apparente, le quotidien des habitants est perturbé par Josef Bousou (Karim Leklou, impressionnant) sui est un peu l'idiot du village. Fils de ferrailleurs vivant en famille avec sa mère Josiane (Serra Yilmaz), ses grands frère Virgile et Thierry, leur compagne et enfants respectifs, semeur de troubles (Manon est violentée, Odette est presque violée, la neuve et essentielle pompe à eau en cette période de canicule est volée, etc...), il est désigné par les villageois comme étant la source principale de tous leurs maux, malgré la bienveillance du vétérinaire Daniel Huot-Marchand (Jean-Pierre Darroussin) et de la vieille Odette (Isabelle Sadoyan).
Karim est amoureux de la jolie Manon, une jolie jeune fille du village, qui se joue de sa débilité, ce qui le bouleverse.
C'est dans ces circonstances que s'installe au village un jeune couple, Rodolphe et Bénédicte Blin avec leur petite fille (Grégory Gadebois, parfait comme toujours, et Camille Figuerreo).
Ambiance particulièrement tendue aussi entre Michel (Michel Bednar) qui possède presque toutes les terres agricoles et qui ne paie pas son eau, et Diane (Carole Franck, époustouflante de force tellurique, crevant l'écran à chaque apparition) don la récolte s'annonce catastrophique.
Manon est violentée, Odette est presque violée, la neuve et essentielle pompe à eau en cette période de canicule est volée, etc...
La chaleur exacerbe toutes les relations jusqu’au jour où iKarim est retrouvé sans vie dans la cour de la maison familiale…

"Coup de feu est un film sur la thématique du bouc émissaire inspiré par un fait divers. Le réalisateur Raphaël Jacoulot explique : "C'est la première fois que je pars d'une matière aussi documentaire. Ce fait divers qui s'est passé dans ma région d'origine m'a interpellé. J'étais troublé que des villageois, ni pires ni meilleurs que d'autres, aient pu être, à un moment donné, soulagés par la disparition violente de l'un des leurs, qu'ils tenaient pour responsables de leurs maux. J'y voyais quelque chose qui parlait de notre monde, de notre société. Une société malade qui se cherche en permanence des coupables." C'est une thématique que le réalisatrice avait déjà abordée dans son précédent et très bon "Avant l'aube" (2010) avec Jean-Pierre Bacri et Vincent Rottiers.

L'un des enjeux du film est de tenter de comprendre le phénomène d'un groupe se liguant contre une personne. Dans "Coup de chaud", tout le village se positionne en effet contre Karim. Pour autant, le réalisateur ne souhaitait pas se placer en position de juge face aux villageois mais davantage inviter les spectateurs à une réflexion en les faisant se mettre à la place de ces gens.

Excellent idée que de procéder comme à la réalisation d'un film noir pour décrire une canicule et les tensions qu'elle génère. Entre le fond si sombre, et la forme si ensoleillée, se dégage une ambiance presque insupportable à soutenir pour le spectateur. Le visage girond de Grégory Gadebois en sueur, le sourire presque carnassier de la solaire Carole Franck, la peau de miel du jeune Sofia Benghaffor... comme déportés dans la torpeur du Mississippi.

Karim Leklou, dans ce rôle difficile et superbe, à la fois lunaire et saturnien, explose à l'écran. Précédemment vu dans de bons films comme "Suzanne" et Grand Central", sachant donner à chaque fois la réplique à de grands comédien, s'impose aussi violemment qu'un Peter Lorrre.

Raphaël Jacoulot a si bien saisi l’implacable mécanisme par lequel les agressivités se répondent et se décuplent, que le spectateur se trouve lui-même happé et collé à son fauteuil. Le drame nous est montré dès la première séquence, car ce qui intéresse Jacoulot, c’est non pas la résolution d’une enquête, mais l’observation patiente de la montée de l’intolérance chez des personnes en apparence respectables.
Toute la mise en scène entretient sa crispation grandissante face à cet insaisissable anti­héros. Avec un vrai sens du récit, de la montée en tension et de la dialectique entre ce qui est montré et caché au spectateur, le réalisateur tricote une pelote adroite entre la débilité débonnaire de Josef, une suite de petits faits divers aussi désagréables que d’origine mystérieuse et le portrait patient d'une communauté villageoise. Avec maîtrise, il conduit le spectateur sur les mêmes fausses pistes où s’engagent les gens du village, des plus vindicatifs aux plus réservés. La distribution est excellente, dominée par l’impeccable Karim Leklou, qui apporte à Josef toute la complexité souhaitée.

Très chaudement recommandé !


Coup de Chaud de Raphael Jacoulot par Critique Chonchon

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